Skip to main content

Rompre avec le sectarisme et avancer vers la reconstruction d’une IVᵉ Internationale révolutionnaire

Le vieux monde se meurt

1. Le capitalisme traverse aujourd’hui une crise profonde et multidimensionnelle, touchant tous les aspects de la vie sociale, économique et politique. La classe ouvrière subit une exploitation accrue tandis que les profits des multinationales atteignent des sommets inédits. En Belgique, l’offensive capitaliste se traduit par la politique réactionnaire du gouvernement "Arizona", qui attaque brutalement les droits sociaux et les conditions de vie de notre classe.

2. Parallèlement, la crise écologique atteint un point critique. La logique capitaliste basé sur l’accumulation infinie du profit, est incapable de répondre aux enjeux du réchauffement climatique, de la pollution et de la destruction des écosystèmes. En Belgique, les inondations catastrophiques de 2021 en Wallonie ont révélé l’incurie totale du gouvernement, incapable de prévenir ou de gérer ces crises, laissant des milliers de familles sans aide réelle. À l’échelle mondiale, les feux de forêts massifs, les vagues de chaleur extrêmes et l’extinction accélérée des espèces montrent que la catastrophe est déjà en cours.

3. Sur le plan international, nous assistons au développement rapide d'une véritable Internationale réactionnaire, avec l’essor de partis et de gouvernements d’extrême droite, de Milei en Argentine à l’AfD en Allemagne, en passant par le RN en France et le Vlaams Belang en Belgique, dont Trump est l’un des pivots centraux. Sa cérémonie d’investiture a mis en évidence ses liens directs avec des figures de l’extrême droite européenne, comme Giorgia Meloni ou Tom Van Grieken, montrant qu’il existe une coordination réactionnaire mondiale visant à imposer un agenda ultra-libéral, autoritaire et nationaliste. Cette dynamique ne doit pas être sous-estimée : elle répond aux besoins des classes dominantes d’affaiblir le camp des travailleurs et des opprimés face à l’aggravation de la crise du capitalisme.

4. Les tensions inter-étatiques s’accroissent, faisant peser la menace de conflits mondiaux de plus en plus directs entre grandes puissances. La guerre en Ukraine, loin d’être un simple conflit régional, est une guerre par procuration opposant l’OTAN et la Russie, tandis que le génocide en Palestine illustre la barbarie impérialiste à son paroxysme. En parallèle, la montée des tensions entre les États-Unis et la Chine prépare un nouveau front inter-impérialiste, tandis que les conflits s’enveniment en Afrique centrale, au Moyen-Orient et en Amérique latine, plongeant des millions de personnes dans l’instabilité et la misère.

5. Cependant, face à cette aggravation de la crise du capitalisme et à l’offensive réactionnaire, la lutte des classes connaît également une radicalisation. En Belgique, les manifestations et grèves contre l’Arizona en témoignent. Le mouvement féministe du 8 mars s’affirme comme une contestation non seulement du patriarcat, mais aussi de son enracinement dans le capitalisme. Le mouvement écologiste, avec des initiatives comme Code Rouge, se radicalise. À l’international, les grèves massives des travailleurs de l’automobile aux États-Unis, les manifestations féministes en Iran ou encore les révoltes étudiantes en Serbie démontrent que la combativité est bien présente.

6. Cependant, ces résistances demeurent dépourvues d’une direction révolutionnaire à même de les unifier et de leur offrir une perspective victorieuse. Face aux crises et à l’offensive d’une Internationale réactionnaire qui tend à se coordonner pour imposer un agenda autoritaire et ultralibéral, il devient plus urgent que jamais de reconstruire une Internationale révolutionnaire. Une internationale communiste ancrée dans les luttes de notre temps et qui porte un projet d’alliance hégémonique avec tous les opprimés. Elle seule peut permettre au prolétariat de s’opposer à l’exploitation capitaliste et de poser les jalons d’une société socialiste affranchie de toute oppression.

La IVᵉ Internationale et les erreurs du passé

7. Léon Trotsky fonda la IVᵉ Internationale en 1938, dans un contexte où le stalinisme et la trahison de la social-démocratie avaient conduit à l’écrasement sanglant des révolutions des années 1920 et 1930 et finalement à la victoire du fascisme. La IVᵉ Internationale devait être un instrument politique de la classe ouvrière mondiale, capable de centraliser et d’unifier les luttes révolutionnaires vers des victoires.

8. Cependant, loin d’être une structure figée, Trotsky envisageait la IVᵉ Internationale comme un cadre en construction, ouvert à des forces plus larges que les seuls marxistes révolutionnaires. Il ne s’agissait pas de bâtir une avant-garde repliée sur elle-même, mais d’agréger les tendances réellement révolutionnaires au sein d’une organisation commune, tout en maintenant une clarté programmatique. Il affirmait ainsi au belge Georges Vereeken1 :

 
« La IVᵉ Internationale ne sera pas formée uniquement de bolcheviques-léninistes. Pour ma part, je suis tout à fait favorable à votre admission. Mais vous représentez une tendance différente de la nôtre en ce qui concerne la politique et le régime. » 2

 De même, il écrivait dans le cadre de discussions en vue de fusionner avec le dirigeant socialiste français Marceau Pivert :

 
« Les bolcheviques-léninistes se considèrent comme une fraction de l’Internationale en construction. Ils sont prêts à travailler main dans la main avec les autres fractions réellement révolutionnaires. » 3

9. Cette méthode était d’ailleurs déjà appliquée au niveau national, comme en Allemagne en 1933, où il affirmait :

 
« Bien sûr, notre tournant ne consiste pas à nous proclamer nous-mêmes comme le nouveau parti. Il n'en est pas question. Mais nous disons que le parti allemand officiel est politiquement liquidé... L'avant-garde des travailleurs allemands doit construire un nouveau parti. Nous, bolcheviques-léninistes, leur proposons notre collaboration. » 4

Ou encore aux États-Unis en 1934 avec la fusion du Communist League of America (CLA) et de l’American Workers Party (AWP) comme le raconte James Cannon dans “Histoire du trotskysme américain” :

 
« Nous avons écrit un éditorial dans un ton très fraternel pour que l'AWP prenne acte de notre invitation à tous les groupes radicaux indépendants pour discuter de la formation d'un parti unifié. »

Cette pratique démontre comment la construction d’une Internationale ne pouvait être considérée comme le simple prolongement d’un groupe existant, mais devait être un processus vivant, basé sur l’expérience de la lutte de classe et l’unification des avant-gardes révolutionnaires.

10. Malgré cette perspective, la Deuxième Guerre mondiale, la répression brutale des régimes capitalistes et staliniens contre les trotskystes, ainsi que l’absence de victoires révolutionnaires consolidées ont plongé la IVᵉ Internationale dans une crise profonde dès ses premières années. Enfin, l’assassinat de Trotsky en 1940 priva l’Internationale de son dirigeant le plus expérimenté et les bouleversements de l’après-guerre finirent d’aggraver la situation précaire du mouvement trotskyste.

11. La IVᵉ Internationale s’est alors fragmentée en plusieurs tendances qui adoptèrent des orientations divergentes. L’histoire de ces différentes tendances mériterait un livre pour les appréhender correctement mais dans les grandes lignes, certaines ont cherché à s’adapter aux expériences réformistes et parlementaires, privilégiant des alliances larges ou pratiquant l’entrisme adaptatif, en perdant une perspective révolutionnaire claire. D’autres, à l’inverse, se sont enfermées dans un sectarisme rigide, considérant leur propre organisation comme la seule et unique continuité légitime du trotskysme. Paradoxalement, certaines organisations ont combiné ces deux tendances, oscillant entre une alliance avec le réformisme et un repli sectaire. Dans l’ensemble de ces tendances, certaines ont également tenté de s’intégrer aux mouvements de libération nationale dirigés par des directions bourgeoises anti-coloniales, soutenant correctement ces processus mais sans défendre, en parallèle, une politique indépendante du prolétariat.

12. Aujourd’hui, le mouvement trotskyste est fortement affaibli et divisé en multiples tendances, incapables de proposer une stratégie unifiée face aux défis de la lutte des classes contemporaine. Certaines organisations ont renoncé à la rupture révolutionnaire, en s’intégrant aux institutions capitalistes ou en adaptant leur politique à des logiques réformistes, tandis que d’autres s’enferment dans une logique d’auto-proclamation, rejetant toute tentative de dialogue et de recomposition avec d’autres courants combatifs du prolétariat. Or, l’histoire a démontré qu’aucune organisation ne peut prétendre, par la simple continuité formelle, être la seule avant-garde légitime de la classe ouvrière mondiale.

13. C’est précisément contre cette tentation du sectarisme que Trotsky mettait en garde :

“Nos propres sections ont hérité d'un peu du venin de l'Internationale communiste en ce sens que beaucoup de camarades sont enclins à abuser de mesures telles que l'exclusion, la scission ou les menaces d'exclusions et de scissions.” 5

Cette culture, née dans le contexte répressif de la IIIᵉ Internationale bureaucratisée, a continué de marquer de nombreux courants trotskystes après 1940. Au lieu de préserver l’unité révolutionnaire dans la clarté programmatique, nombre d’organisations ont recouru à la scission et l’exclusion comme moyens de « préserver la pureté », contribuant ainsi à la dispersion et à l’isolement du mouvement.

14. La révolution d’Octobre 1917, elle-même, illustre pourtant que le renversement du régime bourgeois en Russie, contrairement à l’image que certains véhiculent, ne fut pas le produit exclusif des bolcheviks, mais le résultat d’une fusion révolutionnaire entre plusieurs courants ouvriers et socialistes partageant un même objectif de rupture avec le capitalisme. Si les bolcheviks, sous la direction de Lénine et Trotsky, ont joué un rôle central dans la prise du pouvoir, ils ont pu diriger cette révolution avec l’appui des Socialistes Révolutionnaires de gauche, d’anarchistes et de certaines fractions menchéviques dissidentes.

15. Après la victoire d’Octobre, nombre de ces militants non-bolcheviks ont d’ailleurs rejoint le nouveau Parti Communiste de Russie. Ce parti ne fut donc pas simplement une continuité figée du bolchevisme d’avant 1917, mais le produit d’un processus dynamique d’intégration des éléments les plus combatifs et révolutionnaires de la classe ouvrière russe, issus d’horizons politiques différents, mais unifiés par la pratique.

16. Cet exemple historique montre que la construction d’une avant-garde révolutionnaire ne pourra pas être le produit mécanique d’une seule organisation existante, ni le résultat d’une addition de groupes qui chercheraient une unité de façade sans clarification programmatique et stratégique. Il ne s’agit pas seulement de reconstruire une structure organisationnelle, mais de créer un outil vivant, enraciné dans la lutte des classes et capable d’intégrer les secteurs les plus combatifs de la classe et de la jeunesse. Ce type de pratique se retrouvera plus tard dans la construction de l’Internationale Communiste avec l’intégration de courants révolutionnaires pour certains relativement éloignés du léninisme. À titre d’exemple, les “syndicalistes révolutionnaires” français, qui compteront parmi les dirigeants principaux et les plus sains de la nouvelle SFIC, ou encore l’adhésion, pendant quelques années, de l’anarcho-syndicaliste, Confédération Nationale du Travail (CNT) espagnole, suivie plus tard par une fraction de celle-ci. De même, le groupe féministe socialiste de Sylvia Pankhurst, initialement issu du suffragisme radical britannique, rejoignit l’Internationale Communiste en 1920.

17. Cette reconstruction ne pourra être effective qu’en s’appuyant sur l’expérience de la lutte des classes, en construisant des fractions révolutionnaires dans les syndicats, les mouvements sociaux, féministes, écologistes, queers, antiracistes, etc. et en mettant au cœur du projet un programme internationaliste de rupture avec le capitalisme. Ce programme ne doit pas être une simple déclaration de principes abstraits, mais un outil stratégique, capable d’offrir des orientations consistantes aux luttes et de proposer des réponses concrètes aux crises systémiques.

18. Nous devons avancer patiemment mais sûrement vers une refondation profonde de notre organisation, qui ne pourra pas simplement être, une continuité d’un groupe existant, ni un groupement déclarant des principes abstraits tout en étant incapable de les traduire en mots d’ordres, tactiques et stratégies pour le mouvement réel. Cette organisation devra être animée par un processus dynamique, qui apprend de sa pratique et qui est enraciné dans le mouvement réel. C’est dans cet esprit que Trotsky concevait la construction de la IVᵉ Internationale, et c’est dans cette perspective que nous devons aujourd’hui reconstruire un instrument révolutionnaire internationaliste à la hauteur des défis du XXIᵉ siècle. Cela impliquera de rompre avec les erreurs du passé : affronter à la fois nos tendances historiques à l’auto-proclamation sectaire d’un côté, et celles de notre adaptation au réformisme, à la bureaucratie et à leurs déformations racistes, sexistes et autoritaires de l’autre.

Au source de notre crise: le gène défectueux du grantisme


19. En effet, nous affirmons que notre tradition du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), issue du courant dit grantiste, a été marquée par cette contradiction entre une tendance à l’auto-proclamation sectaire, et une adaptation dégénérative opportuniste aux institutions réformistes et aux bureaucraties syndicales par une longue pratique d’entrisme. Cette double dynamique a conduit à une stratégie inadaptée et à une série d’échecs organisationnels et politiques dans des moments clés.

20. Par ailleurs, l’Alternative Socialist International (ASI), issue de la scission du CIO en 2019, n’a en réalité jamais rompu avec la logique qui a marqué l’histoire de son organisation mère. Malgré des critiques internes sur les dérives bureaucratiques du CIO, l’ASI a poursuivi les mêmes schémas erronés combinées à une vision d’auto-proclamation où elle se considérait comme l’unique héritière du marxisme révolutionnaire et de la meilleure tradition du grantisme.

21. Notre courant historique, dirigé par Ted Grant, s’est construit autour d’une stratégie d’entrisme prolongé dans les partis réformistes de masse, prenant comme modèle principal le travail de The Militant au sein du Labour Party britannique 6. Sans prétendre transformer de l’intérieur ces partis en organisations révolutionnaires, cette orientation reposait sur l’idée que la radicalisation de la classe ouvrière passerait nécessairement par une étape réformiste, impliquant un passage par les partis travaillistes, socialistes ou sociaux-démocrates avant une éventuelle rupture révolutionnaire. En conséquence, les organisations réformistes étaient perçues comme le principal terrain d’intervention des révolutionnaires.

22. Cette stratégie a conduit le CIO à concentrer son implantation au sein des partis réformistes et des structures syndicales traditionnelles et donc des secteurs les plus organisés du prolétariat, notamment les industries nationales, les transports et la fonction publique, où l’influence de l’aristocratie ouvrière est historiquement plus forte. S’il ne s’agissait pas d’“attendre” un hypothétique virage réformiste, le fait de rester durablement dans ces mêmes cadres a pu limiter notre intervention dans des secteurs plus précaires et surexploités, majoritairement composés de femmes et de travailleur·euse·s racisé·e·s.

23. Cette stratégie d’entrisme prolongé a eu des effets contradictoires. D’une part, elle a marqué l'histoire politique britannique par plusieurs succès notables. Dans les années 1970-80, elle a permis la prise  de contrôle des Jeunes socialistes du Parti travailliste, obtenu des sièges au Parlement et exercé une influence sur les syndicats en faisant élire des membres dans les plus hautes instances de ceux-ci. En 1983, elle a dirigé le conseil municipal de Liverpool, mettant en œuvre un programme social ambitieux et défiant le gouvernement de Thatcher. Son plus grand succès fut la campagne contre la Poll Tax (1989-1990), mobilisant des millions de personnes et contribuant à la chute de la Dame de Fer. Avec plus de 8 000 membres à son apogée (en 1987-1988), Militant est devenu un acteur incontournable de la gauche radicale britannique, avant les exclusions et la scission interne du début des années 1990.

24. D’autre part, cette politique a limité la possibilité de construire un parti révolutionnaire indépendant au moment où les exclusions sont tombées et où le Labour était déjà sur une trajectoire de “modernisation” droitière. Après des décennies d’entrisme, les militants trotskystes ont été expulsés sans avoir pu faire de la Labour Party une organisation révolutionnaire. Certes, un “virage à gauche” indépendant fut alors discuté et entériné, mais il amena une crise profonde du Militant et du CIO. De l’aveu de Peter Taaffe ce choix est intervenu bien trop tardivement et aurait dû prendre place une décennie avant quand Militant avait une position de force dans le Labour. La scission se serait alors faites aux conditions des révolutionnaires et non  à  celle des réformistes. Mais la période marquée par le thatchérisme et  surtout la non préparation des membres à sortir du Labour au moment opportun a fortement affaibli la dynamique. Militant qui comptait environ 8 000 membres, a vu ses effectifs chuter autour de 4 000 vers 1992, puis à 2 000 dans la décennie suivante, sans jamais retrouver l’influence qu’il avait eue dans les années 1980.

 25. Dans plusieurs cas, certaines organisations issues du grantisme, comme les ancêtres de l’Internationale Communiste Révolutionnaire (ICR), ont préféré prolonger le travail dans des partis réformistes même lorsque leur capacité à se transformer était devenue quasi nulle. Ainsi, les organisations issues de cette tradition se sont parfois retrouvées piégées dans des luttes internes infructueuses pour "réformer les réformistes", au lieu de poser ouvertement la question de la rupture et de la construction d’un parti révolutionnaire indépendant au moment opportun.


Une répétition du dogme


26. Après la chute du mur de Berlin et l'accélération du processus de bourgeoisification définitif des anciens partis ouvriers réformistes, le CIO décida d’en sortir tout en maintenant la conception linéaire de la radicalisation et en répétant alors le modèle d’entrisme dans de nouvelles formations de gauche. Malgré quelques initiatives notables (Blokbuster en ‘92 ou l’intervention dans le mouvement anti-mondialisation), cette répétition du dogme originel conduisit ainsi ses militants à un certain attentisme messianique vis-à-vis de “nouveaux partis des travailleurs” et, plus tard, à une sous-estimation des dynamiques propres aux nouvelles luttes du prolétariat qui se développaient en dehors des structures traditionnelles du mouvement ouvrier.

27. La montée de Jeremy Corbyn à la tête du Labour Party (2015-2020) a suscité un immense espoir parmi les travailleur.euse.s et la jeunesse. L’organisation a misé sur l’accompagnement critique du corbynisme, espérant à nouveau une radicalisation du Labour sous la pression de sa base. Cette illusion s’est effondrée avec l’arrivée de Keir Starmer, qui a orchestré une nouvelle purge systématique de la gauche du Labour.

 28. Le CIO a suivi la même logique avec Bernie Sanders, soutenant sa participation aux primaires du Parti démocrate. En entretenant l’illusion qu’une victoire de Sanders pouvait ouvrir un espace pour des politiques progressistes, il a ignoré que le Parti démocrate est une machine conçue pour neutraliser toute contestation. L’éviction de Sanders en 2016 et 2020 et son ralliement avec AOC à Harris et Biden a confirmé cette réalité.

29. Le CIO a initialement soutenu Syriza en Grèce, voyant en son ascension une opportunité pour le prolétariat européen. Plutôt que de dénoncer son programme réformiste et son refus de rompre avec les institutions capitalistes, il a misé sur la pression des masses pour pousser Syriza vers des mesures plus radicales. Cette illusion s’est effondrée lorsqu’une fois au pouvoir, Syriza a capitulé face à l’Union européenne et au FMI, appliquant des politiques d’austérité similaires à celles des gouvernements bourgeois précédents. Cela a marqué, de l’aveu même du CIO, une défaite majeure pour la classe ouvrière européenne.

30. La même approche a été prise avec Podemos en Espagne, présentant au début ce parti comme une possible alternative de gauche. Cependant, une fois intégré au gouvernement avec le PSOE, Podemos a démontré sa nature réformiste en gérant l’ordre existant sans remettre en cause les intérêts de la bourgeoisie.

31. Dans chacun de ces cas, Corbyn, Sanders, Syriza, Podemos, le CIO a d’abord soutenu ces formations, de manière critique, en misant sur leur potentiel de radicalisation par étape sous la pression des luttes, au lieu de défendre une alternative révolutionnaire indépendante. Ce n’est qu’une fois leurs faillites avérées que l’organisation a reconnu l’impasse de ces expériences. Mais loin d’en tirer des leçons fondamentales, il a continué à répéter ce schéma, cherchant sans cesse de "nouveaux Corbyn" ou de "nouveaux Syriza".


Un programme de transition adaptatif


 32. Cette adaptation du marxisme à un travail systématique au sein d’organisations réformistes a également conduit à une adaptation du programme révolutionnaire, où les revendications transitoires ont été utilisées sans être clairement reliées à une perspective de dualité de pouvoir et de rupture avec l’État bourgeois. Plutôt que d'insister sur la nécessité d'instituer des organes de pouvoir ouvrier indépendants (soviets, comités d’action, milices ouvrières), The Militant a conçu son programme comme une liste de revendications adressées aux dirigeants réformistes du Parti travailliste. Loin d’être un outil destiné à pousser les travailleurs vers la prise du pouvoir, ces revendications ont été adaptées aux préjugés réformistes dominants pour “ne pas heurter la conscience des masses”. La volonté de ne pas apparaître comme gauchiste a souvent amené à une modération du discours freinant l’affirmation d’une perspective de prise du pouvoir par la classe ouvrière.

33. Cette stratégie se cristallisa autour du slogan répété pendant 40 ans de “Labour to Power on a Socialist Programme”. Cela se traduisait par une approche dans laquelle la transition vers le socialisme pourrait se faire pacifiquement et dépendrait avant tout de l'élection d'un gouvernement travailliste avec un programme socialiste et sous pression des masses et non d’une confrontation avec l’Etat bourgeois britannique. 8

34. Cette modération du programme révolutionnaire s’est aussi traduite par une orientation privilégiant les secteurs les plus plus proches du réformisme du mouvement ouvrier et donc les plus stabilisés, souvent liés à l’aristocratie ouvrière. Plutôt que de chercher à intervenir de manière offensive auprès des secteurs précarisés du prolétariat (travailleurs immigrés, femmes précaires, etc), le CIO a centré son implantation dans les bastions ouvriers traditionnels, via une intervention syndicale axée sur les travailleur.euse.s les mieux intégrés. Cette stratégie a renforcé une approche défensive visant à préserver des acquis sociaux nationaux au détriment d’une perspective anti-impérialiste.

 35. Cela fut particulièrement visible sur les questions coloniales et les mouvements de libération nationale. Par exemple, lors de la guerre des Malouines en 1982, The Militant ne soutenait pas l'Argentine contre l'agression impérialiste britannique. Ted Grant a même qualifié l'Argentine de pays impérialiste, assimilant ainsi le conflit à une guerre inter-impérialiste, une analyse erronée étant donné la domination historique du capital britannique et américain sur l'économie argentine. 9

36. Concernant la question palestinienne, le CIO a également montré des ambiguïtés. Bien que se déclarant en faveur des droits des masses Palestiniennes, l'organisation a souvent adopté des positions qui, avec la crainte de s'aliéner la classe ouvrière israélienne privilégéé par sa position coloniale, en pratique, ne soutennaient pas pleinement la lutte contre l'oppression sioniste. Ainsi, plutôt que de défendre sans équivoque la résistance palestinienne, l’organisation à privilégier des formules générales appelant à une "solution socialiste au conflit" dans le meilleur des cas sans tirer les conclusions stratégiques d’un combat léniniste contre le colonialisme israélien.

37. De plus, la tradition du CIO a eu tendance à considérer les émeutes et les soulèvements spontanés comme contre-productifs pour la lutte des classes. A titre d’exemple, lors des manifestations contre la poll tax en 1990, l’organisation a condamné publiquement via son porte-parole les émeutes qui ont éclaté, les qualifiant de "contre-productives" et attribuant la violence à des "éléments anarchistes". Cette position traduisait une méfiance envers toute forme de lutte qui échappait au cadre institutionnel et syndical. Plutôt que de reconnaître la radicalisation du mouvement, que de dénoncer la répression policière du mouvement, The Militant privilégia une ligne pacifiste qui restait dans la tradition d’influencer la base du Parti travailliste révélant ainsi une approche où la tactique primait sur la dynamique révolutionnaire des masses.

Culture interne du CIO

38. Dès ses origines, le CIO a développé une approche où chaque scission ou conflit interne se traduisait systématiquement par une auto-proclamation puriste, excluant toute possibilité de discussion saine. Cette méthode a abouti à une stratégie fermée sur elle-même, où l’organisation se considérait comme la seule détentrice légitime du marxisme, refusant toute remise en question et isolant ainsi ses militants des processus plus larges de recomposition.

39. Loin de s’appuyer sur la méthode de Trotsky, qui défendait l’idée de travailler avec d’autres fractions réellement révolutionnaires, le CIO a rejeté énormément d'initiatives de convergence préférant une logique d'exclusivité sectaire. Plutôt que de chercher à fusionner ou collaborer avec les tendances radicales issues de la lutte des classes, son modèle reposait sur une vision où toute organisation ou initiative extérieure, du parti ou des organisations réformistes institutionnelles, était considérée comme "non viable" ou "déformée".

40. Dans le même temps, cette auto-proclamation sectaire coexistait avec un opportunisme réformiste, qui s’exprimait par une adaptation constante aux structures réformistes sous prétexte d’un travail patient pour "gagner les masses". L’organisation a ainsi oscillé entre une posture fermée et dogmatique et une adaptation aux réformistes, qui a conduit à diluer sa perspective révolutionnaire et à compromettre son indépendance politique. On a pu constater l’étendue de cela sur le débat sur la Palestine notamment. Pire encore, il a aussi eu des effets déformants de cette politique sur l’organisation elle-même, créant un climat bureaucratique et autoritaire et reproduisant des oppressions structurelles au sein même du parti.


 41. Plutôt que de développer une culture de discussion politique libre, la direction, reproduisant les méthodes de fonctionnement des organisations réformistes où elle menait un travail d’entrisme, a privilégié une organisation très hiérarchisée, où les décisions étaient centralisées entre les mains de quelques cadres dirigeants. Cette concentration du pouvoir a progressivement réduit la place du débat interne, favorisant une approche où les critiques et remises en question étaient perçues comme des attaques contre la cohésion du parti. 

42. A cela s’ajouta un autre problème majeur du grantisme : son incapacité à tirer des bilans politiques, malgré les nombreux revirements qu’il a opéré au fil des décennies, sur ses stratégies, sur ses tactiques, sur ses slogans, etc. Chaque changement était présenté comme une simple adaptation tactique sans jamais questionner le moindre échec passé ni son éventuel cause structurel. Un trait récurrent dans le discours du CIO et de The Militant était également sa tendance à exagérer de manière systématique les aspects positifs dans la situation objective, l’état de la classe ouvrière ou même l’état réél de l’organisation. Sous le prétexte de « toujours voir le positif », ces organisations mettaient en avant le plus petit des succès (et parfois même des défaites) comme la preuve que notre analyse était la bonne, occultant ainsi les revers et les failles structurelles. Cette stratégie rhétorique, qui visait à masquer les problèmes objectif ou subjectif et à maintenir un moral élevé chez les militants, compromettait de fait toute analyse scientifique de la réalité.


43. Au fil du temps, la structure interne du CIO s’est donc rigidifiée, perdant tout ancrage réel dans la base militante et transformant les congrès et les Comités Nationaux en simples exercices de validation des décisions de la direction plutôt qu’en véritables espaces de délibération collective. Les mécanismes démocratiques internes se sont verrouillés, supprimant toute possibilité de contestation et marginalisant systématiquement les opposants. Les désaccords politiques ne se réglaient plus par l’argumentation mais par l’isolement, la fatigue militante entraînant un turn-over important et des scissions destructrices. À chaque crise interne, la direction adoptait une posture autoritaire, cherchant à étouffer les critiques en caricaturant toute forme d’opposition. Les discussions stratégiques étaient restreintes aux cercles dirigeants, et la ligne politique imposée sans débat ouvert, instaurant un climat où toute remise en question était perçue comme une trahison au marxisme. Plutôt que d’engager une réflexion critique permettant d’ajuster ses orientations, le CIO privilégia  la répression interne, conduisant à l’isolement progressif de nombreux cadres historiques et renforçant son enfermement sectaire.

Le CIO face à ses propres oppressions

44. L’adaptation aux institutions réformistes et aux bureaucraties syndicales a également conduit à l’absorption des rapports de pouvoir patriarcaux présents dans ces structures, empêchant ainsi le développement d’une lutte cohérente et sérieuse contre le sexisme et les oppressions queers au sein du parti. À l’instar de The Militant dans les années 1980, qui s’opposait à l’autonomie des groupes opprimés au sein du Parti travailliste britannique (notamment la section noire), le CIO a historiquement minimisé la nécessité d’une organisation indépendante des femmes et des minorités LGBTQ+ au sein du mouvement ouvrier. 10

45. Plutôt que de combattre activement les dynamiques oppressives présentes dans le mouvement ouvrier et dans nos propres rangs, le CIO a souvent adopté une vision économiciste considérant que la lutte contre l’exploitation capitaliste serait suffisante pour abolir les oppressions spécifiques 11. Cette approche, avant l’évolution tardive de ROSA, s’est traduite par une minimisation systématique des revendications féministes et LGBTQI+ en les reléguant à des luttes secondaires par rapport aux "priorités de la lutte des classes". Cette minimisation des oppressions systémiques a eu des effets concrets: les camarades les plus touchées par ces oppressions ont souvent été marginalisées dans l’organisation, tandis que les structures dirigeantes restaient largement composées de cadres issus des secteurs les plus intégrés du mouvement ouvrier. 

46. Ce biais économiciste a aussi eu des conséquences internes graves. Il a favorisé une tolérance implicite vis-à-vis des comportements sexistes et LGBTQIphobes au sein du parti, allant de la banalisation des agressions verbales et physiques jusqu’à la protection de certains cadres accusés de comportements abusifs. Plutôt que de remettre en cause ces dynamiques et de sanctionner les comportements oppressifs, la direction du parti a souvent préféré maintenir un statu quo qui reproduisait les oppressions présentes dans le reste de la société.

47. Face à la quatrième vague féministe, le CIO a initié les campagnes ROSA en Belgique et en Irlande, revendiquant un féminisme socialiste pour répondre aux mobilisations en développement. Toutefois, plutôt que d’en faire un véritable outil d’émancipation féministe révolutionnaire, une couche dirigeante de l’organisation a tenté de l’ instrumentaliser comme un levier opportuniste de recrutement, limitant ainsi son potentiel de développement et la coupant progressivement des jeunes femmes en voie de radicalisation. Alors que ROSA permettait de finalement adopter une rhétorique plus engagée contre le sexisme, ces changements sont restés largement tactiques et non fondamentaux. Cette contradiction a révélé un fossé entre le programme affiché de ROSA et la réalité interne du CIO, marqué par une culture bureaucratique et autoritaire où les décisions restaient concentrées entre les mains d’une élite majoritairement masculine et blanche. Les militantes engagées dans ROSA se retrouvaient ainsi à défendre un féminisme combatif en externe, tout en subissant en interne des structures de pouvoir ossifiées, hostiles à une réelle remise en cause du sexisme au sein de l’organisation. En conséquence, après plusieurs années de succès initiaux, ROSA s’est finalement réduite à un outil de mobilisation qui a fini par saper sa crédibilité auprès des militantes les plus critiques qui y ont vu un obstacle plutôt qu’un vecteur de transformation du réel.

 

48. De manière similaire, le CIO sous estimait aussi les oppressions raciales et avait une vision étapiste 12 des luttes antiracistes. Plutôt que de reconnaître le racisme structurel au sein du mouvement ouvrier et d’y répondre par une politique antiraciste active, le CIO a souvent privilégié une approche "classiste" 13 abstraite, qui considérait que la lutte économique suffirait à dépasser ces oppressions spécifiques. Cela a pu être résumé sous le mot d’ordre « Jobs, geen racism »/ « Des emplois, pas de racisme » qui invisibilisaient les dimensions structurelles et la nécessité d’un combat spécifique sur ce terrain.


49. Cette orientation a produit une invisibilisation des luttes spécifiques des travailleur.euses.s racisé.e.s. En conséquence, les camarades issus de l’immigration ou des minorités raciales étaient rarement mis en avant, tandis que les cadres dirigeants étaient majoritairement blancs, reproduisant ainsi des rapports de domination internes.

50. Nous pensons que ces dérives oppressives ne sont pas le produit de simples "erreurs individuelles" ou de "comportements déviants", mais le résultat logique d’une orientation politique qui a conduit à une dépendance aux structures réformistes malgré une évolution rhétorique vers une reconnaissance des oppressions sur les dernières années. En refusant d’affronter directement ces contradictions, en minimisant les revendications des opprimé.e.s, et en reproduisant les logiques bureaucratiques héritées de la social-démocratie et des directions syndicales, le CIO a créé un environnement où le sexisme, le racisme et l’autoritarisme ont pu prospérer au sein même du parti.

Pour conclure et avancer

51. Si une véritable alternative révolutionnaire veut émerger, elle devra rompre avec les méthodes bureaucratiques, l’auto-proclamation sectaire et l’adaptation opportuniste aux réformistes qui ont marqué l’histoire du CIO et de l’ASI. Il ne s’agit pas simplement de corriger quelques erreurs ou d’amender une structure gangrenée, mais bien de reconstruire une Internationale révolutionnaire à la hauteur des défis du XXIᵉ siècle. Pour cela, il faut tirer un bilan sans concession des échecs du passé : l’intégration aux structures réformistes, l’incapacité à rompre avec les appareils syndicaux, le refus de traiter sérieusement les oppressions systémiques au sein du mouvement ouvrier et la vision économiciste qui a sous-estimé la radicalisation en dehors des cadres traditionnels de celui-ci.

52. Face à la crise actuelle du capitalisme, l’urgence n’est pas d’accompagner les réformistes dans l’espoir d’un hypothétique virage à gauche ou d’une reconstruction tout aussi hypothétique d’un parti réformiste de masse. Nous pensons que l’urgence est de reconstruire un pôle révolutionnaire indépendant, ancré dans les luttes, autour d’un programme de rupture avec l’ordre bourgeois. Cette reconstruction ne pourra pas être le simple prolongement d’un groupe existant, ni une addition artificielle de tendances, mais devra s’appuyer sur la fusion des avant-gardes les plus combatives issues de la lutte des classes. L’histoire de la IVᵉ Internationale et de la révolution d’Octobre 1917 nous enseignent que les victoires révolutionnaires ne viennent pas d’un appareil figé, mais d’une capacité à intégrer et organiser les secteurs les plus combatifs du prolétariat et de la jeunesse.


Déclaration de la résolution : 

Nous rejetons toute approche qui consisterait à considérer que la reconstruction d’une Internationale révolutionnaire pourrait se faire par une simple proclamation ou en rassemblant artificiellement des groupes existants sans clarification programmatique. Nous ne voulons pas d’un cartel artificiel d’organisations, mais d’un pôle révolutionnaire dynamique, enraciné dans les luttes de notre classe, ouvert aux courants combatifs et attaché à une véritable discussion stratégique. 

Nous affirmons que cette reconstruction doit s’appuyer sur trois axes fondamentaux:

Un regroupement des ailes révolutionnaires des organisations trotskystes existantes, qui contestent les dérives opportunistes ou sectaires de leurs directions et qui sont prêtes à tirer un bilan sans concession des échecs passés. Il ne s’agit pas de reconstruire une IVᵉ Internationale par en haut, mais de rassembler celles et ceux qui veulent une organisation révolutionnaire réellement indépendante du réformisme, ouverte aux expériences de luttes réelles et aux avant-gardes émergentes.

L’intégration des nouvelles avant-gardes qui émergent dans le prolétariat et dans les mobilisations féministes, antiracistes et écologistes. Le potentiel révolutionnaire ne se trouve pas seulement dans les organisations traditionnelles de la classe, mais aussi dans les nouvelles générations militantes qui s'organisent en dehors de ces organisations.

Une intervention active dans la lutte des classes, pour structurer ces forces autour d’un programme de transition. Il ne s’agit pas simplement de dénoncer l’exploitation et l’oppression, mais de proposer une stratégie claire pour en finir avec elles, en posant concrètement la question de l’auto-organisation du pouvoir des travailleureuses et d’une transformation révolutionnaire de la société. Cela demande à ce que nos militant.e.s se profilent, avec humilité, comme des organisateur.trices de la lutte quotidienne contre toutes les oppressions et l’exploitation.


Nous nous engageons à :


Rejeter toute approche sectaire et bureaucratique implique de construire une organisation véritablement démocratique, où la prise de décision est collective et où les débats politiques sont encouragés plutôt que étouffés. Cela signifie rompre avec les pratiques autoritaires qui conduisent à la concentration du pouvoir entre quelques cadres et à l’écrasement des divergences internes. En ce sens, la “Résolution sur le centralisme démocratique et le fonctionnement du parti” marque un premier pas important pour notre organisation.


En finir avec l’invisibilisation des oppressions systémiques en interne. Le sexisme et le racisme ne disparaissent pas automatiquement par la seule pratique militante, mais doivent être combattus activement au sein même de nos structures. Cela implique entre autres un effort actif pour favoriser la participation et la mise en avant des camarades issus des groupes les plus marginalisés. Enfin cela nécessite aussi des mesures concrètes déjà développées dans la partie “Comment aller de l'avant” de la “Résolution sur la sauvegarde, la culture interne et la lutte contre l'oppression”.

Développer une approche d’appel unitaire, en favorisant la formation de fronts uniques sur des thématiques spécifiques (contre l’Arizona, le racisme, le sexisme, la répression, etc.), est une nécessité stratégique pour renforcer l’auto-organisation et la combativité de notre classe. Cela implique de chercher systématiquement à construire l’unité d’action à la base, en évitant toute posture d’observateurs propagandistes et en s’engageant activement comme des acteurs de ces luttes. L’intervention dans Commune Colère constitue un excellent exemple de cette approche démontrant qu’il est possible de fédérer divers secteurs militants et organisations autour d’objectifs communs tout en maintenant un profil révolutionnaire. 

Établir un dialogue avec les autres courants révolutionnaires est essentiel pour construire une nouvelle Internationale révolutionnaire. Dans cette perspective, nous proposons d’ouvrir des discussions avec des organisations telles que la Gauche Anticapitaliste (GA), l’Organisation Communiste Révolutionnaire (OCR) et Lutte Ouvrière (LO Belgique), tout en privilégiant un échange avec Révolution Permanente (RP) qui est aujourd’hui l’organisation la plus dynamique et avec laquelle nous partageons une proximité politique forte sur la centralité du prolétariat tout en prenant très au sérieux les luttes contre les oppressions. De plus, la Fraction Trotskyste - Quatrième Internationale (FT-QI), à laquelle appartient RP, est la seule organisation internationale à avoir mené un véritable processus de revue critique de sa propre tradition, au point de rompre complètement avec le morénisme, dont elle était pourtant issue. Nous aurions énormément à apprendre de la méthodologie et des conclusions de ce processus pour notre propre revue critique. 

Organiser, dans cette optique, des rencontres et débats publics ouverts, non pas dans une logique de polémique stérile, mais comme des espaces d’échanges constructifs permettant soit pour approfondir une collaboration concrète dans les luttes, soit pour clarifier les divergences de manière fraternelle



1 Chauffeur de taxi, membre du P.C. belge à sa fondation et de son C.C. En 1925, avait été exclu en 1928 avec la majorité du C.C. qui était passée à l'Opposition. Il était resté fidèle à l'Opposition internationale en 1930 quand il y avait eu scission en Belgique, et il s'était rangé du côté de Charleroi. En 1934, il avait été violemment hostile au « tournant français » (« l'entrisme ») et en 1935, il avait refusé de suivre la majorité de la section belge qui avait décidé l'entrée dans le Parti Ouvrier Belge. Il fut ensuite le protagoniste d'autres polémiques avec Trotsky notamment sur la Révolution espagnole et l'attitude à avoir vis-à-vis du le P.O.U.M. Après guerre, il fut un partisan fidèle de M. Pablo au sein du mouvement trotskyste.

https://wikirouge.net/texts/en/Letter_to_Georges_Vereecken,_October_11,_1935

3 https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1935/08/lt19350807.htm

4 https://www.marxists.org/francais/broue/works/1988/00/PB_tky_46.htm

https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/defmarx/dmb.htm#FB

https://www.marxists.org/archive/grant/1959/03/entrism.htm

7 Lénine analysait l’aristocratie ouvrière comme un produit de l’impérialisme, bénéficiant de concessions financées par les superprofits des grandes puissances pour stabiliser une partie du prolétariat et diviser la classe ouvrière. Bien que cette couche ait souvent servi de relais au réformisme en soutenant les appareils syndicaux et sociaux-démocrates, elle a aussi joué un rôle structurant dans la construction du mouvement ouvrier. Cependant, son intégration progressive aux institutions du capitalisme l’a amenée à cautionner des trahisons historiques. Loin d’un rejet total, il s’agit de comprendre son rôle contradictoire: moteur de certaines luttes, mais aussi frein lorsqu’elle est captée par le réformisme.

https://www.marxists.org/archive/grant/1982/05/falklands.htm

9 Ibidem

10 "Because ‘gay rights’ have been made an issue in some student circles, it is necessary to comment in passing on Gay Liberation . . . Beyond [the struggle against legal discrimination] ‘gay liberation’ belongs to the sphere of personal relations. It is necessary to maintain a sense of proportion. Certain dilettantes, notably in the NUS, have exploited the diversionary value of this issue to distract attention from more important issues which cause them political embarrassment. Serious socialists will recognise that ‘gay liberation’ cannot provide the slightest social basis for an independent contribution to the labour movement. The various exotic theories and emotive arguments that are sometimes advanced to prove otherwise are simply symptoms of the utter confusion and lack of perspectives that still prevail in purely student politics." http://www.thesparrowsnest.org.uk/collections/public_archive/8195.pdf

11 “. . . whilst socialists should certainly adopt a sensitive and conscious attitude to all expressions of discrimination and prejudice, it would be a mistake to be drawn into a campaign against the superficial manifestations of sexual inequality to the detriment (sic) of explaining and fighting against the conditions from which they arise. Campaigns against ‘sexism’ and ‘male chauvinism’ inevitably reflect, albeit unconsciously, the assumption that women’s greatest enemy is “man” . . . [human prejudice] cannot be eradicated by preaching and denunciation, which if anything, will tend to reinforce them . . . as soon as the workers are involved in class action all the apparently indelible prejudices of the past begin to be washed off very rapidly.” http://www.thesparrowsnest.org.uk/collections/public_archive/8195.pdf

12 "D'abord la révolution socialiste, ensuite on réglera le racisme"

13 "Class first"







Contacte-nous !

Tu veux discuter, débattre, militer, ou simplement poser des questions ?

Écris-nous !